Université de Strasbourg

Séminaire Fellows conjoint - Le rôle de l'horloge circadienne

Le 15 septembre 2022
De 15h00 à 17h00
MISHA, Strasbourg


Par Atish Mukherji et
Tsvetan Serchov

Les travaux de ces deux Fellows de 2020 touchent différent aspects de l'horloge circadienne. Ils présenteront leurs recherches respectives lors d'un séminaire commun, avec deux présentations séparés.

 

Atish Mukherji - L’horloge circadienne hépatique et sa relation avec les maladies hépatiques chroniques chez l’humain

Afin d’anticiper et de répondre à la variabilité géophysique quotidienne, par exemple le cycle jour-nuit, les espèces de divers embranchements - dont les métazoaires - ont développé un appareil de « chronométrage » endogène connu sous le nom d’horloge circadienne. Le système d’« horloge » des mammifères est un réseau hiérarchique d’oscillateurs biologiques qui assure le contrôle temporel de la physiologie et du comportement en fonction de l’heure de la journée. La découverte des mécanismes qui dirigent ce système d’« horloge » moléculaire a constitué l’élément moteur du prix Nobel de physiologie ou médecine 2017. Des recherches récentes ont commencé à révéler les liens mécaniques qui pourraient exister entre ce système d’horloge et diverses pathologies. Toutefois, notre compréhension de l’expression génétique temporelle spécifique aux tissus et contrôlée par l'horloge, ainsi que la manière dont elle contribue à l’homéostasie au niveau de la cellule comme de l’organisme, reste rudimentaire et en constante évolution. Ces recherches sont essentielles, non seulement afin de révéler les mécanismes moléculaires via lesquels une horloge « altérée/défectueuse » pourrait mener au développement d’affections chroniques, mais également afin de créer des thérapies ciblées.

 

Tsvetan Serchov - Le rôle de l’horloge circadienne moléculaire dans la neurobiologie et le traitement de la dépression

La dépression fait partie des troubles mentaux invalidants les plus fréquemment diagnostiqués, et se caractérise par des dérèglements du sommeil et des rythmes biologiques. Toutefois, nous ne savons pas clairement si ces dérèglements de l’horloge circadienne et de l’homéostasie du sommeil sont une cause ou une conséquence de la dépression.

Afin de le déterminer, nous avons étudié les effets du stress chronique et des antidépresseurs rapides (la privation aigüe de sommeil (SD), et l’application de kétamine à faible dose (KET)) sur l’oscillation des gènes de l’horloge circadienne dans le cerveau. Les souris soumises à un stress chronique montrent une plus grande amplitude d’expression de plusieurs gènes-horloges, alors que les traitements antidépresseurs rapides normalisent leur expression.

Nous avons ensuite testé les effets de modulateurs pharmacologiques de l’horloge circadienne sur l’humeur. Nous avons trouvé que le traitement aigu avec l’activateur RevERBa SR10067 accroît les comportements de type dépressif et inhibe les effets antidépresseurs de SD et KET, alors que le traitement par l’agoniste RORa/g SR1078 entraîne des effets antidépresseurs dans plusieurs paradigmes comportementaux. En outre, l’élimination de RevERB entraîne une plus grande résilience face au stress et une diminution des comportements de type dépressif. Par ailleurs, l’altération de l'horloge circadienne induite par un virus de manière sélective dans le cortex préfrontal (CaMK2a-BMAL1KO) inhibe les effets antidépresseurs de KET.

Nous avions précédemment démontré que les effets antidépresseurs rapides de KET et de SD sont médiés par une signalisation glutamatergique accrue. De même, nous avons maintenant démontré que la modulation de l’horloge circadienne affecte la plasticité homéostatique et le trafic AMPAR.

Dans leur ensemble, nos données indiquent que l’horloge circadienne joue un rôle important dans la réponse au stress et le traitement par antidépresseurs rapides, ce qui nous permet de suggérer que la modulation pharmacologique de l’horloge circadienne pourrait constituer une nouvelle approche efficace de traitement de la dépression.

France 2030