Séminaire Fellows - Que pouvons-nous discerner depuis les épaules d’un géant ?

Par Édouard Mehl, Fellow 2022

Écrire l’histoire de la philosophie au 21^e siècle

Avant de donner un aperçu des résultats récents d'une recherche menée au cours de ce Fellowship USIAS (2022-2024) dans le champ de la philosophie contemporaine (édition de J. Héring¹, et de J. Derrida²), il s'agira de proposer ici quelques considérations plus générales sur la notion même d'histoire de la philosophie. De fait, depuis Hegel jusqu'à Heidegger, la philosophie n'a plus le rôle positif d'une fondation (logique, métaphysique ou transcendantale) des sciences, mais d'une méditation réflexive sur ce rôle ; aussi doit-elle inlassablement, comme Pénélope, reprendre son propre travail, et défaire, pour la refaire à nouveau, la tapisserie qu'elle a elle-même patiemment tissée.

Cette activité n'est ni un vain ressassement ni une complainte stérile sur l'oubli et la « perte du sens ». C'est une recherche qui obéit à un idéal d'exactitude et d'apodicticité, non moins que n'importe quelle discipline scientifique. On en donnera ici un exemple en étudiant l’une des constantes remarquables de la philosophie : son lien avec les mathématiques, et en particulier avec la réflexion menée, de Platon à Derrida, sur « l’origine de la géométrie ».

Cette question, certes, n'est pas simplement factuelle, et ne se comprend pas seulement comme la question de l'origine historique des mathématiques en Mésopotamie ou en Basse-Égypte. Mais, dans la mesure où cette question est celle du rapport non éclairci entre les techniques d'arpentage et la possibilité théorique de la mesure, on plaidera ici en faveur d'une philosophie plus solidement arrimée à cet héritage historique, et en prise directe avec l'histoire des sciences et des arts.

• En lire plus sur sur Édouard Mehl et son projet USIAS : L'altérité de l'Autre. Genèse et réception critique des Méditations cartésiennes de Husserl (1931) dans la philosophie française contemporaine.